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Un regard sur la route
19 février 2012

Le lendemain matin, la bande de zoulous-aztecs

Le lendemain matin, la bande de zoulous-aztecs des Master 2 nous emmènent, Simon et moi, au cinéma Paradisio. La salle est planquée derrière un Match, entre deux terrains vagues, une décharge et un sapin. A l'intérieur, le Paradisio grince et craque comme un vieux navire. Les sièges de cuir rouge couinent et les planches sentent l'authentique et le poussiéreux. Il fait froid. L'ambiance parfaite.

Au menu ce matin :

THE WOMAN

The-Woman-Affiche

La femme.

Ouai. La traduction pue un peu.

C'est vrai que la classe que peut donner la langue anglo-saxonne à certain titre de films s'écroule souvent sous la tentative de traduction. Mais qui sais... «  Etoffons, » disait l'autre, « Etoffons, et le monde s'étoffera » :

LA NANA ?

Hum, non.

LA SAUVAGE ?

Trop loin.

LA FEMELLE ?

Ouai. La femelle, c'est pas mal. Ça sonne un peu québécois, mais tant pis.

Donc, LA FEMELLE est un film de Lucky McKee.

Autant dire qu'un film de ce genre au petit matin, c'est un peu comme se servir un bol de Chocapics avec de la vodka. C'est radical. McKee tente un mélange entre A history of violence de Cronenberg et Take Shelter de Jeff Nichols, remixé à la sauce sanguine et au survival. L'histoire, en gros, c'est un père de famille qui récupère une femme sauvage dans la forêt, la menotte dans son garage, la présente à toute sa famille et dit avec un beau sourire benêt : « Nous allons civiliser cette femme. » Le regard de chacun annonce la couleur. Le noyau familiale va littéralement éclaté en mille morceaux...

Le début est assez bof, voir chiant. L'un des gros problèmes du film, c'est surtout le choix des musiques. Mettre du rock-pop dégoulinant avant une scène de viol, c'est « Mouai, bof, nan... » ou faire un ralenti d'une fille qui pleure sur du gazon avec un ersatz d'Hoobastank en arrière fond, c'est «Oh, j'aurais pas osé... ». Peut-être qu'un seconde degré planait là où je ne l'avais pas vu, mais si c'était vraiment pour faire de l'émotion, c'est raté. Un sentiment de déséquilibre global plane donc sur tout le film, peut-être justifié par le coup de fouet final. Car une violence sauvage va finalement percuter la morale inflexible du père - limite post-colonialisme- et va donner naissance à un renversement de valeur fort surprenant.

Le générique passé, l'air frais revenu, une idée germe lentement en tête - et on pense à Laurent Juiller et ses analyses sur les lunettes de chiotte dans Shining - : LA FEMELLE est un film sur le refoulé, une métaphore sur une société qui enferme la part bestiale de sa nature dans la noireur de sa cave et tente de la dompter à coups de baguettes et de sécateurs. Les rôles s'inversant, le gène du monstre se révèlant dans l'arc génétique du père, il va se transmettre à son fils, laissant les filles et la mère sur le bas côté. Mais la femelle, telle une super-héroïne, va se rebeller et sortir les vers du cocon famillial pour en sauver les dernières graînes. La scène où la femelle fait goûter le sang du père à sa fille reste pour moi LA plus belle scène du film, poignante, juste et viscéral.

Manquait vraiment un juste milieu.

The-Woman-2

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