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Un regard sur la route
9 septembre 2014

Journal de Chine

JOURNAL CHINOIS

 4/6

 

Mardi 22 Juillet : 5ème Jour

 

Matin, grasse matinée. Dehors, 82% d'humidité. Une torpeur moite qui t'étouffe et te bouche les narines d'un coton invisible. Odeur dégueulasse dans l'air. « C'est moi ou ça sent les égoûts ? »

On filme l'entraînement du matin, au milieu d'une brume jaunâtre. Le soleil se cache derrière ce voile opaque. Des centaines de grosses libellules vrombissent tout autour de nous. On dirait qu'elles s'entraînent, elles aussi. Avec Quentin, on doit se placer sans se gêner pour filmer. L'art du cameraman réside dans la création d'un cadre photographique propice à la capture du mouvement. Pour que l'image soit belle et que l'action soit prise dans son ensemble. Parfois ça marche, parfois ça coince. T'as vu comme j'ai bien appris mes cours de cinoche ? Hein ? Si ça t'ennuie ce que je dis, tu peux aussi te peinturlurer les testicules avec de la térébenthine ! C'est pas moi qui le dit, c'est San-A. Oui lecteur, pendant le séjour, j'ai lu un livre de San-Antonio. Et comme d'hab', ça transpire sur mes relents stylistiques, j'y peux rien.

Après-midi, pause. Visite du centre d'entraînement de ping-pong. On assiste à une compétition. Rentrée en ligne des arbitres et des joueurs sur une musique patriotique. Old-school, les gars. Par contre, ça envoie de la chique pendant les matchs, à vous donner le tournicolis !

Derrière la compèt, on fait quelques balles. Loïc joue contre une chinoise. Il joue bien le Lolo. C'est alors qu'un bambin s'approche de nous. Avec les mêmes joues-joues que Mao-En-Tong. Michèle, l'interprète, me propose de jouer contre lui. Je suis tout heureux. Enfin un adversaire à ma taille ! Raquette en main, on fait quelques échanges. Et là, v'lan, le petit bout'd'choux me destroy la gueule, façon David contre Goliath. Trop rapide le p'tiot. Il me dégomme des bastos de derrière le filet, j'suis aux fraises. Le seul moyen que j'ai pour le mettre dedans, c'est de faire des balles hautes, mais faut préciser qu'il a 8 ans le champion et qu'il doit mesurer 40cm au garot. Lolo prends la relève. A l'aise. On prends des photos avec le ping master. Je fais pâle figure. Le père du gamin, à côté, a un sourire grand comme la muraille de Chine.

Fin d'après-midi, deux victoires faciles de nos footballers. Je les engueule en leur expliquant que j'ai parié pour un 8-0 et qu'un petit effort ne serait pas de refus. Ils rigolent. De toute façon, ils sont en finale... Ils sont en finale... Ils sont, ils sont, ils sont en finale... ( Chants des supporters de 98. C.F Les Yeux dans les Bleus.)

 

Mercredi 23 Juillet : 6ème Jour

 

Journée type. Filmage des matchs. Interview des joueurs. Encore des victoires faciles. Entre deux buts, j'apprends des mots en chinois avec Michèle, l'interprète. Elle s'appelle en fait Shao Li. Mais elle préfère se donner un nom français. C'est plus facile à retenir, qu'elle me dit. Elle a un style rigolo, Michèle. Un jour, elle porte une robe saumonée vaporeuse et des ballerines légères. Le lendemain, elle porte un t-shirt peau de vache, des baskets rose, une casquette américaine avec « Mickey » dessus. Variation des styles, opé ! Elle m'apprends comment on dit « Orage » en chinois. C'est un très beau mot qui forme une boucle de vent dans votre bouche. Elle m'apprends aussi « J'aimerais 3 Tsing Tao», ce qui peut servir en cas de sècheresse de gorge.

Diner. Riz matin, midi, soir. On ne serait pas contre un jus de fruit, des patates sautées, un rumsteak et une béarnaise. On est des enfants gâtés, hein, mais là, ras le bol du riz (Encore un jeux de mots désopilants ! Attention, lecteur, avec toute cette hilarité, la lecture de ce texte pourrait s'avérer dangereuse. Je décline toute responsabilité en cas de croisements des zygomatiques ).

Après ma douche, il m'arrive un truc chiant. Loïc me dit qu'il vient de recevoir un mail de ma part... alors que je suis en face de lui. Et que c'est pas possible. Intitulé du mail : « Terrible Situation ». Gotferdom ! Qu'est-ce que c'est que ces salades ? Je vérifie ma boîte mail. Impossible d'y aller. Faut dire qu'en Chine, pas de Facebook, de Twitter ou de Google. Tant pis, on doit aller à un repas protocolaire. Je suis bité.

Nous pensions aller à un petit repas entre amis, guindé certes, mais tranquille. Pas la grosse beuverie de l'année, quoi...

Attendez plutôt.

Entrée dans la salle du « Nid d'Oiseau ». Rouge vermeil, teintures dorées, bois d'acajou lustrés et tout le toutim. Je rentre là dedans comme un manant au château du roi. Au centre, une grande table ronde. Déjà installé, les entraîneurs, la dame du conseil général des Vosges, le représentant du sport de Weifang et le directeur de la chambre de commerce. Débute alors un repas d'anthologie. Des mets plus savoureux et plus étranges les uns que les autres défilent. Je vous dirais que ça me fait penser à une scène de cinéma, mais là, tout est vrai. Donc basta les comparaisons !

Avant le premier coup de baguette, une serveuse passe devant nous et remplit un verre (à ras bord) d'une boisson qui ressemble à de l'eau. Après investigations, cette eau est de vie, et plutôt du genre à ramener à la vie un mort-vivant qui aurait fait de la plongée sous-marine en état d'hypnose. Nom du carburant : « Chinese Spirit » ( Si t'es pas anglophone, ça veut dire : « L'esprit chinois »). Autre particularité de la cérémonie, on doit finir le verre en 6 coups. Et uniquement quand quelqu'un porte un toast. Je regarde Quentin. Il hume le liquide et fait une moue de mec qui a déjà le mal de mer rien qu'à voir la houle. Fous rires. Premier lever de coude. Et v'lan dans les dents, 45 degré direct dans l'estomac vide. Mes yeux piquent et ma langue me demande pourquoi tant de sauvageries. Au 6ème toast, je finis le verre cul sec. « Il faut manger pour absorber...», que je répète à Quentin, en fin expert. On se prends du lard. Du poulet. Du riz. Il y a aussi des « Churros ». (Des vrais.) Des soupes étranges. Et des mets incongrus, comme des langues de canards.

Nos verres de « Chinese Spirit » finis, nous pensions que le massacre allait s'arrêter, mais la serveuse nous ressert encore. A côté, Quentin n'en peut plus. Il rigole tout seul. Rien que de penser à sa tête, j'ai la banane. Avec Lolo, on doit battre le record du nombre de verres torchés. Le repas fini, nous étions censés faire des interviews, mais ça tangue trop pour cadrer droit. Retour à l'hôtel. Forcément, sur la route, on croise les ados qui roucoulent avec des coréennes. Ils se foutent de ma gueule, soit disant que je serais légèrement éméché. Teu, teu, teu... L'un d'eux me vole une claquette. Je me bats pour la récupérer. Et pour leur prouver que je suis net, je fais la cigogne ( Une technique alsacienne de dégivrage). Ils sont bluffés, les cocos.

Quentin n'arrête pas de filmer. Emilien lui n'arrête pas de rire et Loïc continue le festival. Les entraîneurs reviennent brutalement à la réalité. Ils prennent les jeunes entre quatre yeux et leur rappellent que la finale, c'est demain. Retour aux chambres.

Hôtel. Enchaînements de blagues salaces. De discussions politiques sur la notion d'accouplement extra-conjugal. Le tout, avec détachement et dégrin-rigolades. La paillasse d'Emilien prends cher. C'est un peu le porte-bonheur du séjour, la paillasse du Mils. Pour ta gouverne, lecteur, la paillasse, c'est ce qui fait office de ventre. Et si la paillasse fut le mot d'ordre du séjour, c'est parce qu'en Chine, les chinois biens portants ont l'habitude de relever leurs t-shirt et d'arborer fièrement leur bedaine à l'air libre. Assez mythique.

On me met à l'épreuve : pas cap d'aller toquer à cette porte. Ni une, ni deux, j'y vais. Derrière, c'est la dame du conseil général qui m'ouvre. Elle me dit qu'elle arrive. Je reviens en bombant le torse. Quand elle arrive, les discussions prennent soudain un tournant plus sérieux. Je ressors mes anecdotes d'intellectuels : En fait, la Chine, en chinois, ça se dit Zhonghuo : « Pays du Milieu ». La France, ça se dit « Faguo ». J'ai donc voulu savoir ce que voulait dire le « Fa » sachant que « Guo » voulait dire « Pays ». Et figurez vous que « Fa » veut dire « Loi ». Pour les chinois, nous sommes donc le « Pays de la Loi ». C'est classe. Même si j'aurais préféré être le « Pays du Schnaps ».

Le reste de la soirée se déplie en déconnes, en virées plus ou moins obscènes et en vidéos qui heurteraient votre morale. Si tu me croises de visu, et que tu m'paies deux trois bières, je pourrais peut-être t'en toucher un mot. J'dis pas.

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Commentaires
L
Ahahahaha ! Merci Math' ! La prochaine fois, je viendrais tout te raconter ! :D<br /> <br /> Bises !
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M
Excellent, merci beaucoup pour cette tranche de vie, vivement la suite.<br /> <br /> Moi j'ai plein de bières à la maison, donc...<br /> <br /> Bises<br /> <br /> Mathieu
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